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jeudi 11 décembre 2025

Montagne et domaines skiables : L’IA s’invite en altitude

L’IA fait son entrée dans l’univers de l’aménagement en montagne. En se démocratisant et en étant de plus en plus accessible (collectivités, fournisseurs, professionnels, citoyens) l’intelligence artificielle est entrée dans l’aménagement de la montagne ces dernières années, en agissant sur plusieurs axes majeurs: optimisation des infrastructures et des flux, amélioration de la sécurité et de la prévention des risques, personnalisation de l’expérience touristique, gestion durable des ressources et transition écologique, modélisation et planification territoriale. L’IA peut offrir une vision plus intelligente, durable et résiliente de l’aménagement de la montagne, en améliorant la gestion des infrastructures, la sécurité, l’expérience client et la transition écologique. Elle favorisera aussi la planification collaborative et l’innovation dans la gestion des territoires de montagne. Du 21 au 23 avril 2026, Mountain Planet réunira à Grenoble l’ensemble des acteurs mondiaux de l’aménagement en montagne et de la mobilité douce, pour un événement qui s’impose comme la vitrine des innovations et des réalisations. Sur plus de 60 000 m² d’exposition, industriels, constructeurs, territoires et opérateurs présenteront les derniers projets emblématiques français et internationaux, avec pour certains les nouveaux usages de l’IA pour transformer l’expérience touristique, optimiser l’exploitation des domaines skiables et rendre la montagne encore plus connectée, durable et tournée vers l’avenir.

 

Gestion du damage et de la neige

Il existe des exemples concrets et déjà opérationnels d’utilisation de l’IA pour optimiser le damage des pistes de ski. Le plus connu est la solution SNOWsat (par Kässbohrer, fabricant des dameuses PistenBully) utilisée dans plusieurs stations de ski en Europe. Les algorithmes guident les dameuses sur les trajets optimaux, en économisant du carburant et en maintenant la qualité de la neige de façon optimale.

Des capteurs GPS embarqués sur les dameuses + capteurs de profondeur de neige transmettent des données à une plateforme qui analyse en temps réel la hauteur de neige, la géolocalisation, l’inclinaison du terrain, etc. L’algorithme suggère aux conducteurs les itinéraires de damage optimaux pour ne pas endommager les zones à faible enneigement, minimiser les passages inutiles (gain de carburant, réduction du CO₂), maintenir une qualité de damage constante et ainsi réduire l’usage de neige de culture là où ce n’est pas nécessaire.

En France, Suisse, Autriche, Allemagne, beaucoup de domaines skiables utilisent ce système ou des solutions similaires (comme LEITNER’s Skadii).

Les domaines skiables nord-américains au Canada ou aux États-Unis intègrent des systèmes comparables (comme SnowGroomer ou TechnoAlpin).

Les bénéfices mesurés vont jusqu’à 15-20 % de carburant économisé pour les dameuses. Suivant les domaines skiables, on note aussi des bilans mesurables sur la production de neige de culture, avec jusqu’à 30 % de neige de culture économisée dans certaines stations et 10 % de réduction à Laax. Chaque domaine skiable étant différent (exposition, altitude, enneigement///) les pourcentages varient d’un domaine skiable à l’autre.

TECHNOALPIN a développé le logiciel ATASSpro qui est basé sur des prévisions météorologiques précises, pour donner une prévision de production avec une prédiction fiable de la quantité possible de neige productible pour les sept prochains jours.

Prévision des avalanches

L’IA analyse désormais les données météorologiques, topographiques et historiques pour anticiper les risques d’avalanche avec plus de précision que les méthodes traditionnelles. L’IA croise les données météo (neige, vent, température, humidité), données de terrain (pente, altitude, orientation), les images satellites ou lidar avec les données historiques d’avalanches. En Suisse le SLF (Institut fédéral pour l’étude de la neige et des avalanches) a développé en avril 2024 des modèles IA capables de prédire le danger d’avalanche à 3 jours avec un bon taux de fiabilité. Plusieurs algorithmes de machine learning analysent les données d’observation de la neige, météo et historique d’avalanche (une bibliothèque de plus de 20 ans de données), produisant des évaluations du danger pour améliorer les bulletins automatiques. Aux États Unis Colorado Avalanche Information Center (CAIC) utilise des modèles de classification par machine learning avec IA pour assigner un niveau de danger (1–5) à des zones spécifiques. L’IA pourrait apporter dans un avenir très proche en montagne des bulletins plus précis, plus fréquents grâce à l’automatisation et la rapidité de traitement. Toutefois, compte tenu de la complexité des phénomènes météo et des bouleversements du climat, l’IA ne peut pas pour l’instant remplacer l’expertise humaine sur ce sujet.

Aide à la recherche et au sauvetage

L’IA s’invite désormais dans l’aide à la recherche et au sauvetage. L’IA possède de très nombreux avantages comme la rapidité des recherches par la couverture de grandes zones. L’IA peut identifier les victimes invisibles à l’œil nu. Il réduit les risques pour les sauveteurs car nécessite moins de personnel exposé sur le terrain de jour comme de nuit. Il permet d’optimiser la coordination grâce au partage en temps réel de coordonnées précises aux équipes de recherche et au commandement. Pour l’Europe, la société norvégienne AvalanchePRO, développé par ATLAS UAS, intègre un capteur ARVA sur drone (comme AtlasPRO) pour localiser des victimes ensevelies sous une avalanche. Testé en Norvège par des équipes comme Norwegian People’s Aid, le système permet de couvrir rapidement de grandes zones, très efficacement. Au Canada, North Shore Rescue intègre des drones avec caméras thermiques et IA capables d’identifier des sources de chaleur dans des terrains escarpés pour repérer rapidement des personnes (randonneurs/skieurs) et sécurité renforcée en zones isolées. En Roumanie, Vodafone teste SARUAV, un système IA d’analyse d’imagerie en direct sur drone qui détecte formes humaines et vêtements, transmet les coordonnées aux secours en quelques minutes.

Systèmes de remontées mécaniques assistés par l’IA

La société française Bluecime possède une longue expérience des produits pour télésièges et télécabines qui reposent directement sur des algorithmes d’intelligence artificielle et de vision par ordinateur. Son système intelligent de vision artificielle par ordinateur SIVAO, analyse en temps réel les images pour détecter les défauts de fermeture de garde-corps, comportements à risque, suroccupation des cabines etc., et déclencher des alertes ou consignes. De nouveaux produits Bluecime basés sur l’IA sont en cours de déploiement comme l’analyse de files d’attentes et d’autres sont en cours de développement, comme des solutions d’analyse des flux des personnes sur le domaine skiable. L’ensemble des systèmes Bluecime, basés sur des briques d’IA pour une fiabilité optimale, seront regroupés dans une solution globale baptisée « SOFTEN » utilise l’IA pour quantifier les skieurs sur pistes et en files d’attente, modéliser les flux et proposer des recommandations d’exploitation (notamment sur les vitesses de remontées) afin de réduire jusqu’à 20% la consommation d’énergie. A titre d’exemple en France, Bluecime a équipé sur le domaine skiable des Sybelles la quasi-totalité des télésièges de St Sorlin et du Corbier de son système SIVAO Télésiège (meilleure sécurité pour les clients, meilleure gestion du télésiège avec connaissance remplissage de la ligne, etc.). Toujours aux Sybelles cet hiver, Bluecime va aussi équiper la Télécabine Côte du Bois, sur La Toussuire pour le comptage des usagers dans cabine (meilleure gestion de la télécabine pour savoir si cabine occupée ou pas, connaître le taux d’occupation, etc).

Aux Sybelles cet hiver, Bluecime va aussi équiper la Télécabine Côte du Bois, sur La Toussuire pour le comptage des usagers dans cabine (meilleure gestion de la télécabine pour savoir si cabine occupée ou pas, connaître le taux d’occupation, etc).

La société suisse Mantis Ropeway Technologies AG a développé un système baptisé Mantis Autonomy qui utilise des caméras et un logiciel d’intelligence artificielle pour surveiller la descente des passagers et détecter les dangers. Ceci permet à la station d’arrivée d’un télésiège de fonctionner sans personnel permanent (Cette technologie n’est pas autorisée en France et les règles suisses et autrichiennes imposent d’avoir un opérateur à moins de 5 min de la gare d’arrivée). Après cinq ans de développement, les premiers permis d’exploitation ont été accordés en décembre 2023 et six autres remontées mécaniques ont été mises en service durant l’hiver 2024/25. Déjà déployé avec succès dans plusieurs stations de ski, ce système présente un fort potentiel pour l’avenir de l’ensemble du secteur des remontées mécaniques dans les pays qui autorise la supervision de remontées mécaniques sans personnel. « Mantis Autonomy » a remporté en octobre 2025 le Prix suisse de la montagne durant le Forum Suisse des téléphériques de Rapperswil-Jona.

 

Maintenance prédictive

L’IA fait son entrée dans la maintenance prédictive appliquées aux transports par câble — remontées mécaniques, télécabines, et infrastructures associées par la surveillance des équipements (câbles, pylônes, cabines) pour anticiper les pannes ou l’usure avant qu’elles ne posent un problème. Plusieurs constructeurs proposent déjà ce service à leurs clients. Doppelmayr a développé AURO (Autonomous Ropeway Operation). Ce système semi-automatisé avec capteurs (caméras, vibration, température), permet une exploitation sans personnel en cabine. Ce dispositif inclut une maintenance prédictive qui anticipe les besoins techniques grâce à l’analyse en continu des données

L’IA est également impliquée dans l’inspection des câbles. FATZER et LETSCAN effectuent des recherches sur TRUscan.deep, un système automatisé d’inspection de la corde inductive magnétique visant à inspecter et identifier tous les dommages, y compris ceux mineurs de surface. Leitner analyse les données issues des capteurs pour repérer automatiquement les signes précoces de fatigue des câbles, paliers ou moteurs, déclenchant des interventions ciblées plutôt que des inspections périodiques non spécifiques. Le programme « mountain ropeways renovation » de POMA intègre des capteurs embarqués et un monitoring avancé, destinés à améliorer la disponibilité des installations et à réduire les coûts de maintenance en repérant des possibles problèmes de fonctionnement.

NZSki en Nouvelle-Zélande utilise des technologies de surveillance avancées pour les remontées mécaniques, permettant une détection rapide des incidents et une maintenance prédictive, ce qui réduit le gaspillage d’énergie et de ressources, et limite les temps d’arrêt.

Processus d’ingénierie pour le transport par câble, les systèmes d’enneigement, de sécurité en montagne et les infrastructures de loisirs à sensations.

L’intégration de l’intelligence artificielle dans les process d’engineering du groupe français MND à partir de 2026 marque une nouvelle étape dans la performance et la fiabilité de ses solutions pour la montagne et les mobilités.  En s’appuyant sur la data et des algorithmes d’optimisation, les équipes peuvent concevoir plus vite des systèmes plus sobres en énergie, mieux adaptés aux contraintes de chaque site.  L’IA vient enrichir toutes les phases de développement : dimensionnement des équipements, simulation des comportements en conditions réelles, maintenance prédictive et amélioration continue des installations. Cette approche permet de réduire les cycles d’étude, de sécuriser les choix techniques et de fiabiliser les délais de réalisation. D’autres constructeurs vont aussi s’engager pour intégrer l’intelligence artificielle dans les processus d’ingénierie afin que les projets soient plus performants, plus durables et parfaitement alignés avec les enjeux climatiques et économiques des territoires de montagne.

Surveillance en temps réel

La surveillance en temps réel des versants par l’IA ouvre un nouveau champ pour la sécurité en montagne, car la détection d’un flux de débris à venir le plus tôt possible est essentielle pour protéger la vie humaine, les paysages et les biens. En croisant des images satellites à haute résolution et des flux de caméras ou capteurs au sol, des algorithmes détectent automatiquement des micromouvements de terrain, l’apparition de fissures glaciaires ou la formation de couloirs d’éboulis, bien avant qu’ils ne soient visibles à l’œil nu. Ces systèmes distinguent les évolutions lentes (déformations progressives d’un versant) des phénomènes rapides (rupture de sérac, glissement brutal), ce qui permet d’adapter à la fois les seuils d’alerte et les scénarios d’évacuation.  Déjà déployées en Suisse, en Norvège et dans d’autres massifs, ces solutions combinées apportent une capacité d’anticipation inédite pour les gestionnaires de domaines skiables, collectivités et exploitants d’infrastructures, en réduisant le risque de catastrophe et en améliorant la protection des populations comme des équipements. Des projets issus de la recherche (ETH Zurich, WSL, etc.) utilisent des capteurs sismiques avec intelligence artificielle + machine learning pour détecter plus tôt les laves torrentielles et avalanches de débris en zones alpines.

Suivi de la biodiversité, l’IA au service de la faune et de la flore grâce à des caméras intelligentes pour suivre leur évolution.

Parmi les outils qui pourraient être étudiés pour évaluer s’ils sont adaptés aux domaines skiables ; il y a DeepFaune, un logiciel français collaboratif et gratuit qui fait figure de référence pour le recensement de la faune et le suivi de nombreuses espèces. DeepFaune identifie automatiquement les espèces animales sur les images issues de pièges photos, ces boitiers à déclenchement automatique installés dans la nature. Il utilise des pièges‑photo en montagne via des caméras automatiques pour identifier ongulés (sangliers, renards…), grâce à environ 150 000 photos/an qui sont générées dans les Alpes et traitées par IA. DeepFaune embarque des algorithmes d’IA de pointe, entrainés par une équipe de scientifiques d’unités mixtes de recherches CNRS des universités suivantes : l’Université Grenoble Alpes (UGA), l’Université Savoie Mont-Blanc (USMB), l’Université Claude Bernard de Lyon (UCBL) et l’Université de Montpellier (UM). Son développement repose sur une démarche de science collaborative et compte plus de 60 partenaires – parcs nationaux, associations, conservatoires, fédérations de chasseurs, particuliers… – qui contribuent en partageant des millions d’images annotées, indispensables à l’entrainement des modèles. Ce réseau de terrain, structuré autour d’une logique sciences et société, est l’un des piliers du projet. L’IA couplée à des caméras intelligentes en milieu montagnard permet d’identifier automatiquement jusqu’à des dizaines de milliers d’images par an en quelques minutes, d’atteindre des précisions de détection supérieures à 97 % (DeepFaune), de réduire drastiquement le temps de tri manuel pour obtenir des ensembles de données. Un domaine skiable qui installerait un certain nombre de pièges-photo stratégiquement répartis autour du domaine skiable pourrait ensuite analyser les images via l’IA grâce à DeepFaune pour générer des inventaires saisonniers (hiver/été), suivre les variations annuelles et produire des indicateurs de biodiversité en permanence.

À propos de Mountain Planet : Créé en 1974 à Grenoble (France), MOUNTAIN PLANET est le salon mondial de l’aménagement et de l’industrie de la montagne qui se déroule à ALPEXPO le parc événementiel de Grenoble, en Auvergne-Rhône-Alpes. Rendez-vous international de l’aménagement de la montagne, vitrine des plus récentes innovations et tendances des marchés, cet événement majeur pour les professionnels de la montagne rassemble tous les deux ans l’ensemble de l’écosystème mondial de la montagne (industriels, élus, collectivités, hébergeurs, exploitants de domaines skiables…). Il permet aux professionnels de la filière de dévoiler innovations et dernières tendances/technologies pour aménager durablement la montagne en été et en hiver. À chaque édition, MOUNTAIN PLANET accueille plus de 900 exposants et marques internationaux. Sa surface d’exposition est de 60000 m2. Plus de 20.000 visiteurs professionnels en provenance de plus de 68 pays y participent. L’édition 2026 du salon MOUNTAIN PLANET se déroulera du 21 au 23 avril 2026 à Grenoble-ALPEXPO (France). Plus d’infos sur : mountain-planet.com

Alexandre Bérard
Alexandre Bérardhttps://www.alternativemedia.fr
Alexandre Bérard. Fondateur et directeur d'Alternative Media. Relations presse de : MND Group - Polartec - Domaines Skiables de France - Compagnie des Alpes - Les Sybelles - Serre Chevalier Vallée Domaine Skiable - Salon Mountain Planet

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